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Pollution

Nouvel éclairage sur la catastrophe de la baie de Minamata, plus de 50 ans après

En 1956, les habitants de la baie japonaise de Minamata déclarent les symptômes d’une étrange maladie neurologique. Rapidement, les rejets de mercure émanant d’une usine sont incriminés. Mais sous quelle forme la population a-t-elle consommé ce métal lourd ? Début 2020, des chercheurs identifient un nouveau composé potentiellement responsable de la catastrophe.

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Empoisonnement au Mercure dans la baie de Minamata.

La maladie de Minamata, qui a fait des milliers de victimes entre 1956 et 1968, est liée à la pollution de la baie et à l'intoxication des habitants par des composés contenant un métal lourd : le mercure. 

AP/SIPA

La catastrophe de la baie de Minamata, située sur la côte Ouest de l’île japonaise de Kyūshū, constitue l’un des cas d’empoisonnement par des déchets industriels les plus marquants de l’Histoire de la toxicologie.

De 1956 à 1968, l’usine pétrochimique de la société japonaise Shin Nippon Chisso évacue dans la mer des déchets de production contenant des métaux lourds et notamment du mercure. Pendant 12 ans, les habitants et les animaux de la baie les consomment et déclarent des troubles neurologiques encore jamais observés à cette échelle. Au début des années 2000, le gouvernement japonais annonce ainsi que sur les 2265 victimes de cette intoxication, 1784 auraient trouvé la mort. Les conséquences humaines, économiques et sociales de ce drame sont telles qu’une Convention de Minamata visant à réduire les émissions mondiales de mercure est adoptée à Genève en janvier 2013.

Mais si la tragédie de la baie de Minamata a permis à l’Humanité de reconnaître les risques liés à l’utilisation industrielle de métaux lourds, elle l’autorise également à mieux comprendre ces risques. Année après année, décennie après décennie, des scientifiques du monde entier continuent d’étudier cet empoisonnement de masse et d’en préciser les mécanismes. Le 13 février 2020, une équipe internationale de chercheurs canadiens, américains, anglais et japonais annonce par communiqué avoir peut-être identifié l’espèce de mercure qui aurait contaminé les habitants de la baie de Minamata et qui faisait encore polémique. Leurs résultats sont détaillés dans un article publié par le journal Environnemental Science and Technology.

L’intoxication au mercure, ou hydrargyrisme

Dès le milieu des années 1950, les animaux puis les habitants de la baie de Minamata ont présenté les symptômes d’une affection qui a rapidement été appelée "maladie de Minamata". Les signes cliniques de cette maladie sont principalement neurologiques : ataxie (trouble de la coordination des mouvements), difficultés d’élocution, troubles visuels et auditifs, convulsions, voire coma convulsif pouvant mener à la mort. Le traitement de ce syndrome étant limité, celui-ci peut laisser des séquelles neurologiques importantes telles que de multiples paralysies motrices et des retards mentaux. A l’époque, les seuls individus qui n’ont pas contracté de tels symptômes étaient les femmes enceintes, protégées par leurs enfants à naître qui eux, une fois mis au monde, ont présenté des troubles importants. Rapidement, les médecins ont identifié ce syndrome comme étant celui d’un hydrargyrisme, c’est-à-dire d’une intoxication au mercure.

En fait, ce tableau clinique qui suggère une atteinte cérébrale et en particulier du cervelet est lié à une propriété chimique importante de l’espèce de mercure incriminée : sa lipophilie, c’est-à-dire sa capacité à se dissoudre dans l’huile. C’est cette propriété qui lui confère la capacité de passer les barrières de l’organisme telles que la barrière placentaire (qui protège le fœtus) ou la barrière hémato-encéphalique (qui protège le système nerveux central) puis à s’accumuler dans les tissus riches en graisses tels que le tissu nerveux qui compose l’encéphale.

Mais sous quelle forme particulièrement lipophile les habitants de la baie ont-ils absorbé ce métal lourd ?

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