Sylvie Testud dans Gamines, son roman devenu film

Sylvie Testud livre son troisième roman Gamines dans le film du même nom, réalisé par Eléonore Faucher et dans lequel elle incarne Sybille, une petite fille qui attend de rencontrer un jour le père qu’elle n’a jamais connu. Une adaptation qui a touché l’actrice. Sortie le 16 décembre 2009.
Par Aurélia Scheyé

Sylvie Testud dans Gamines, son roman devenu film

Sylvie Testud : l’adaptation de son roman Gamines au cinéma

Vous avez reçu plusieurs offres d’adaptation de votre roman au cinéma qui ne vous avaient pas convaincue. Pourquoi avoir répondu à celle d’Eléonore Faucher ?
J’étais un peu perplexe quant aux premières propositions. Je trouvais étrange que des hommes presque vieux aient envie de se mettre dans la peau de petites filles, parce qu’il s’agit quand même dans Gamines de trois petites filles qui divinisent la figure de l’homme, avec d’un côté le père absent et de l’autre le parrain. Ça aurait peut-être été bien mais en rencontrant Eléonore je ne me suis même pas posé la question, ça a été immédiat, on s’est tout de suite senties proches. J’avais déjà adoré son film Brodeuses, et puis on est de la même génération, on parlait de la même chose finalement. Et en plus elle parvenait à universaliser Gamines, j’avais l’impression qu’elle parlait de son histoire. J’étais sûre qu’elle ferait quelque chose de bien, tout m’a paru simple et évident.
L’idée de réaliser cette adaptation vous avait-elle traversé l’esprit avant ?
Des producteurs m’ont appelée dans un premier temps pour me demander de réaliser l’adaptation de Gamines. Et ils ne comprenaient pas pourquoi je refusais de le faire. Je leur ai expliqué que mon livre n’était pas autobiographique, seules les relations entre les personnages sont vraies. Et je ne voulais pas tomber dans le travers d’une adaptation pour laquelle je m’investirais dans les moindres détails et finirais par raconter ma vie, ce que je trouve totalement inintéressant. Donc je savais que ce n’était pas pour moi. Et quoiqu’il arrive un livre reste un produit fini, mon livre me plaît parce que je l’ai écrit comme que je voulais, je n’avais pas envie de revenir dessus. Ca m’a paru naturel de le livrer à quelqu’un d’autre pour l’adaptation et de laisser carte blanche à Eléonore. Et aussi notre avis sur Gamines et le synopsis du film.

Sylvie Testud dans Gamines : « J’ai adoré le film »

Que ressent-on en découvrant l’adaptation de son propre roman à l’écran ?
Lors du premier visionnage, j’avais peur que le passage du roman à l’écran ne se soit pas bien fait. J’avais peur de ne pas voir un film mais des pages. Pourtant je connaissais déjà un minimum ce film puisque je jouais dedans et qu’Eléonore m’avait dirigée. Et c’est en le voyant une deuxième fois que j’ai compris que ça fonctionnait, parce que les gens riaient beaucoup et on entendait des reniflements, j’ai été touchée.
Que pensez-vous du film, Eléonore a-telle fait les bons choix selon vous ?
Totalement ! J’ai adoré le film et j’ai trouvé que c’était mieux que mon livre. Parce qu’Eléonore a eu cette capacité d’aller beaucoup plus droit en maintenant le fil conducteur. Elle a réussi à raconter l’histoire en 1h30 de film en enlevant 100 pages du livre ! Et le casting est réussi, Amira Casar (dans le rôle d’Anna) est sublime, Jean Pierre Martin (dans le rôle de Salvatore) est vraiment hors du commun et les trois fillettes impressionnantes. Et aussi notre avis sur Gamines et l'interview d'Amira Casar.

Sylvie Testud : « Je voulais qu’Eléonore s’approprie le livre »

Vous êtes avant tout l’auteur d’un roman dont vous avez été maître, quel effet ça fait d’être ensuite dirigée derrière la caméra ?
J’ai d’abord refusé. Je voulais qu’Eléonore s’approprie le livre du début à la fin parce que je me doutais que le livre allait de toute façon me revenir dessus comme un boomerang. Je n’ai aucun rôle dans ce livre, je ne suis que « photographe ». Pourtant la force de persuasion d’Eléonore m’a amenée à essayer et je crois que je n’ai pas eu tort. Même si de toute façon la vérité de ce que l’on est et celle de ce que l’on interprète se croisent, se frôlent forcément à un moment donné, c’est ça l’essence du métier d’acteur, il y a toujours une part de nous-mêmes dans un rôle. Et il y a eu des croisements dans ce film. Jouer le personnage de Sybille dans Gamines c’était être au cœur du métier d’actrice, être tantôt dans le vrai, tantôt dans le faux. Finalement je me suis faite dirigée dans un film qui est tiré de mon roman qui est lui-même tiré de ma vie mais surtout de ce je suis intérieurement aux yeux de la réalisatrice.
Amira Casar et vous incarnez deux personnages différents dans Gamines. Qu’en est-il dans la « vraie vie » ?
J’aime beaucoup Amira, c’est en plus une actrice superbe. On s’est rencontrées au conservatoire et je me suis rendu compte à l’époque qu’elle était aussi mannequin. Ca m’a beaucoup intriguée et j’ai découvert qu’elle avait un syndrome que j’avais aussi, une image qu’on nous collait à ce moment-là. Celle d’une jeune fille qui manquait de grâce pour moi et une plastique trop parfaite pour Amira. Ensuite j’ai découvert ses qualités d’actrice en voyant ses films.
Et même si nos deux mondes sont différents, ils se rejoignent. Il y a des gens comme ça avec qui on s’entend bien même si nos opinions diffèrent. C’est comme ça que ça se passe avec Amira, c’est agréable avec elle de pouvoir faire notre métier avec sérieux sans se prendre au sérieux. Et aussi notre avis sur Gamines et l 'interview d'Amira Casar .

le 10/12/2009