Goldorak : quand les artistes se souviennent du héros de leur enfance qui voulait "sauver le genre humain"

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Goldorak : quand les artistes se souviennent du héros de leur enfance qui voulait "sauver le genre humain"

Par
Greendizer
Greendizer
- Greg Guillemin/ Galerie Sakura

À Paris, pour la seconde fois, la galerie Sakura propose une exposition d'œuvres contemporaines consacrées au personnage de Goldorak. Le héros du dessin animé japonais de la fin des années 1970 dispose d'une communauté de fidèles de plus en plus large.

Débarqué sur France 2 (Antenne 2) en 1978 dans le cadre de la programmation jeunesse Récré A2, le dessin animé japonais Goldorak créé par  Go Nagai a eu un succès fou en France, plus qu'au Japon. Aujourd'hui, c'est une madeleine de Proust pour les quadragénaires et quinquagénaires qui cultivent leurs souvenirs d'enfance en collectionnant t-shirts ou figurines. La galerie Sakura à Paris, pour la deuxième fois en dix ans, a demandé à des artistes de revisiter le personnage à leur manière.

Goldorak pour les nuls

On vous rappelle l’histoire en quelques mots : le personnage et héros principal est Actarus, prince héritier de la planète Euphor ayant fui sa planète natale à bord de Goldorak, son robot vaisseau. Ce robot a la particularité d'être un transfuge de la planète Véga, c'est-à-dire qu'avant, il était du côté des méchants.

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Goldorak est une gigantesque machine de guerre extraterrestre en deux parties, très lourdement armée. L'engin est stationné dans un lieu tenu secret du Centre de recherches spatiales. Il appartient typiquement aux robots géants qui fleurissent dans les séries de science fiction japonaises des années 1970.  Il forme donc un binôme de choc avec Actarus, qui le sort de sa base secrète dès qu'un danger guette.

Le héros écolo ?

Pour être précis, Goldorak, issu d'un manga japonais, avait pour nom à l'origine, Goldorak (UFOロボ グレンダイザー, UFO Robo Grendizer). L'artiste Greg Guillemin a joué sur le nom initial Grendizer, pour transformer le robot en icône écologiste adaptée au XXIe siècle. Car si aujourd'hui nous parlons de "sauver la planète", c'est exactement le thème du générique d'il y a plus de 40 ans : il s'agissait d'échapper aux méchants attaquants de la planète Vega et combattre leurs monstres mécaniques, les Golgoths. Les paroles de la chanson ne disaient-elle pas : "Accours vers nous Prince de l’espace, viens nous aider, viens défendre notre Terre, elle est en danger. L'avenir du genre humain, tu l’as dans tes mains !"

C'est ce qui a donné l'idée à Greg Guillemin, de revisiter le personnage en mode écolo,  sur un tapis de verdure, avec une fleur au bec. Il est passé de Grendizer à Greendizer  "comme s’il fonctionnait à l’énergie solaire ou éolienne". Dans d'autres réappropriations, Greg Guillemin a posé le logo d'Arcelor Mittal sur le bras de Goldorak, pour avoir un peu de dérision, ou bien lui fait avaler une citerne de la marque Total.

Une icône qui n'a pas été avalée par la machine hollywoodienne

Goldorak n'a pas eu le même destin que les héros des comics américains, il n'a donc pas été revisité sans cesse par l'industrie cinématographique. "Pour moi, ça lui donne plus de valeur, il est plus symbolique encore et iconique. Il ne s'est pas altéré avec le temps", confie Greg Guillemin.

Pour Jean-Baptiste Simon, programmateur de l'exposition à la galerie Sakura, "ce héros, qui est en fait un robot transfuge du camp des "méchants", contrairement à Dark Vador, est resté l'ami des ex-petits garçons. 80% des demandes de renseignements ou d'achats que nous recevons viennent des hommes, des cinquantenaires qui désormais ont quelques moyens. Mais je vois aussi des jeunes qui ont l'air de reconnaître Goldorak, parce qu'ils ont vu des rediffusions sur les chaines de télé."

Blockbusters
54 min

Goldorak revisité dans tous les styles

D'une manière générale, les artistes qui ont répondu à l'appel de la galerie Sakura ont grandi avec Goldorak. "Nous avons contacté des personnes plus jeunes, mais elles semblaient moins inspirées, et n'avaient pas de vécu avec le héros".

Pour le street artiste Jo Di Bona, qui a également  grandi avec Goldorak, et dont le travail repose sur les figures de la pop culture, "l'intérêt pour Goldorak est ancien. Pour moi ce personnage, c’est un gros bonhomme en acier, qui m’a impressionné. Je rêvais d’être dedans, de le piloter comme Actarus."

Pour l'exposition de ce mois de mai 2021,  il a fait deux toiles et deux sculptures : "J'aime mélanger les esthétiques, puiser dans la pop américaine et insérer de vieilles affiches japonaises et de manga. J'ai aussi mélangé la pochette du disque récré A2, c'est un salé-sucré esthétique", confie-t-il.

Ses premiers Goldorak, faits en 2015, ont été achetés rapidement. "Notre génération des années 1980-90, on est tous nostalgiques de cette époque. On se raccroche à nos souvenirs d’une période insouciante où l’on se sentait puissant. Ce sont des années magnifiques, aujourd'hui les enfants rêvent moins. Avec internet et les réseaux sociaux, les jeunes scrollent et n'ont plus le temps de se plonger longuement dans un univers."

Colorful Goldo par Jo Di Bona
Colorful Goldo par Jo Di Bona
- Galerie Sakura

Au contraire de cette approche un brin nostalgique, les frères Mignon, du duo d'artistes Mr Cute, s'approprient le héros en le transportant dans des univers et des époques différents. "On était super fans, et on travaille beaucoup sur le thème de l’uchronie", explique Jean-François Mignon. "Cela nous a amené à marier Marylin avec John F. Kennedy, puis à installer Goldorak au bord de la même piscine que Candy, qui est un autre des animés japonais qui passait à la télé française à la même époque."

Assis sur sa bouée en plastique Goldorak perd un peu de sa superbe, et la dérision de Mr Cute permet de regarder tout cela avec recul.

Le duo  Mr Cute replace Goldorak dans une ambiance californienne, avec Candy, autre icone manga des années 70-80
Le duo Mr Cute replace Goldorak dans une ambiance californienne, avec Candy, autre icone manga des années 70-80
- Mr Cute/ Galerie Sakura

La galerie Sakura montre aussi les travaux photographiques de Travis Durden, comme ce Goldorak échoué au fond d'une forêt. Et l'on se demande s'il va vraiment sauver le genre humain.

Lost in jungle, featuring Sébastien Maillard
Lost in jungle, featuring Sébastien Maillard
- Travis Durden, galerie Sakura

VISITER - "Goldo expo" de la galerie Sakura du 19 mai au 18 juillet

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