Bruxelles

Bruxelles : un haut lieu du surréalisme va bientôt refleurir

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Par Marc Oschinsky

Magritte y avait ses habitudes. Ainsi que le poète Louis Scutenaire, le peintre Pierre Alechinsky, ou l’écrivain flamand Hugo Claus. Ce serait là, raconte la légende, que Hergé aurait trouvé l’inspiration pour créer le personnage du capitaine Haddock, en voyant un client éméché affalé sur une table.

La Fleur en Papier Doré, rue des Alexiens, à un jet de pierre des Marolles et du Sablon, c’est un lieu mythique de l’histoire du surréalisme belge et de la branche bruxelloise du mouvement Cobra. Ce café, créé au sortir de la deuxième guerre mondiale, accueillait la fine fleur, en papier doré ou pas, de ce mouvement artistique. Ses murs s’ornent de témoignages de ce riche passé : photos, collages, tableaux, aphorismes qui font rêver, du genre de " Tout homme a droit à 24 heures de liberté par jour ".

C’est Gérard/Geert Van Bruaene qui a présidé à la naissance du lieu. Cet acteur, poète et marchand d’art l’a animé pendant 20 ans, jusqu’à sa mort, en 1964. C’est lui qui a gardé son côté " estaminet folklorique " (comme le dit une pancarte sur la porte d’entrée), avec son poêle trônant en son milieu, son sol en carrelage d’une autre époque et son vieux comptoir de bois.

L’endroit est riche en histoires. Des histoires qui tiennent peut-être de la légende, mais comment savoir ? Il en est ainsi de la série de dessins dans un cadre bien accroché à la porte d’entrée. Ils seraient de Magritte. " Mais Gérard Van Bruaene était aussi marchand d’art, explique Gilles Lantez, un des repreneurs. Tout ce qu’il exposait était à vendre. Et, comme il était aussi assez doué, il se murmure que ces Magritte seraient de sa main. Il les aurait dessinés pour remplacer les originaux, qu’il avait vendus. "

Après la mort de son fondateur, la Fleur a continué tant bien que mal. Malgré un classement, en 1997, de la façade et de l’intérieur du rez-de-chaussée, la gestion s’est révélée parfois difficile. A tel point que, en 2006, c’est la faillite. Un groupe d’une soixantaine de personnes, principalement des Bruxellois néerlandophones, le reprend et tente de lui insuffler une vie nouvelle. Survient le covid, puis la guerre en Ukraine et ses conséquences sur l’inflation et le comportement des consommateurs. Résultat : deuxième fermeture, à l’été 2022.

Le CPAS de Bruxelles, propriétaire des lieux, est alors parti à la recherche d’un nouvel exploitant, qui aurait une expérience en matière de gestion Horeca. Et ce sont les propriétaires de la brasserie Verschueren, au parvis de Saint-Gilles, qui l’ont emporté. Il faut dire que, pour eux, ce n’est qu’un juste retour des choses. En 2006, lors de la première faillite, ils avaient déjà posé leur candidature, mais n’avaient pas été retenus. Leur intention : ne rien changer au cadre et à l’ambiance, qui attirent aussi bien les Bruxellois que les touristes. De toute façon, classement oblige, interdiction de toucher à un cadre ou à la couleur des murs, dont la peinture a été brunie par des générations de fumeurs. " D’ailleurs, reprend Gilles Lantez, quand les exploitants précédents ont repeint, ils ont choisi une couleur jaune-brun, pour rendre cet aspect à l’identique. "

Les nouveaux exploitants entendent bien revenir à l’esprit du fondateur, en en refaisant un estaminet où différentes activités culturelles trouveront leur place. Des activités plus en prise avec l’air du temps. " Après tout, fait remarquer Arthur Van Craen, le deuxième des trois repreneurs, l’Académie des Beaux-Arts est en bas de la rue. ". Réouverture prévue : mi-mai 2023

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