En 1905, sous la houlette d’hommes politiques comme Jules Destrée, le mouvement wallon essaie de se structurer face au mouvement flamand et d’avoir l’adhésion de la population francophone du pays. A l’époque, les symboles sont importants pour créer une identité, il faut aux Wallons et Wallonnes une hymne, une devise, un drapeau. Le dessin et les couleurs de ce dernier sont sujets à tergiversations qui vont durer plusieurs années.
De nombreuses pistes sont envisagées, mais toutes petit à petit écartées. Un sanglier ? Trop ardennais. Un taureau ? Trop agressif. Une étoile ? Déjà sur le drapeau de la colonie congolaise. Une alouette ? Sans vrai rapport. Au fil des débats, trois symboles se détachent : l’écureuil individualiste et vif, mais pas assez sociable, le perron liégeois facile à reproduire en monument sur chaque place wallonne mais trop particulier à la cité ardente, et le coq très décoratif et représentants des valeurs morales fortes (fierté, combativité), mais trop français.
L’harmonie des couleurs est également très discutée. Faut-il choisir le noir-jaune-rouge pour montrer son attachement à la patrie ? Prendre une couleur commune aux blasons des provinces ? On écarte le bleu-blanc-rouge pour des raisons évidentes, mais aussi le vert et rouge, couleurs de Bruxelles. On hésite sur le rouge et or, trop proche des couleurs de Liège.
En 1913, la décision est prise, ce sera un coq rouge sur fond blanc, avec une écharpe aux couleurs belges passant derrière. Et pour se différencier du coq chanteur français, le coq wallon sera "hardi", la tête haute et une patte levée. L’oiseau est populaire, et déjà utilisé par plusieurs organismes. Oui mais voilà, à Liège, des voix s’opposent au blanc trop salissant. Le drapeau ferait penser à un linge taché de sang et ressemblerait trop à celui du Japon. L’or et rouge de Liège reviennent sur le tapis, car ce serait un symbole fort pour souligner l’importance historique de la ville dans la construction de l’identité wallonne. Les discussions repartent, et un vote est prévu lors d’une assemblée, en avril 1913, à Ixelles.
C’est là que l’histoire s’empreint d’un surréalisme à la belge. Car la majorité des représentants politiques wallons est en faveur du drapeau blanc et rouge, mais une incompréhension des votes tronque le résultat… Car beaucoup votent pour le drapeau qu’ils ne voulaient pas, pensant que le choix concernait un blason que l'on avait aussi décidé de créer ! Impossible de revenir en arrière, le vote a eu lieu. Le mouvement wallon a donc son drapeau. Il sera accompagné d’une devise, "Wallon, toujours" et d’un cri, "Liberté !".