Bertrand Blier débarque sur Amazon Prime : de Marie-Ange à Marie tout court, nos cinq rôles préférés

Douze films du cinéaste sont désormais disponibles sur la plateforme, avec leur tripotée de sales types, de braves femmes et de personnages embarqués dans d’improbables aventures. On n’est pas bien, là ?

Bertrand Blier, en 1978.

Bertrand Blier, en 1978. Photo Étienne George/Collection Christophel

Par Michel Bezbakh

Publié le 21 mai 2022 à 19h00

Mis à jour le 21 mai 2022 à 19h05

Miou-Miou, Marie-Ange dans “Les Valseuses” (1974)

Patrick Dewaere, Miou-Miou et Gérard Depardieu dans « Les Valseuses » (1974).

Patrick Dewaere, Miou-Miou et Gérard Depardieu dans « Les Valseuses » (1974). CAPAC

Dewaere et Depardieu volent la DS d’un type, mais aussi, tant qu’à faire, sa femme. Chez Blier, les dames sont souvent les victimes de ces messieurs qui ont du mal à les considérer autrement que comme des objets, susceptibles de satisfaire leurs besoins (sexuels, souvent) ou de servir de monnaie d’échange. La pauvre Miou-Miou est l’une d’entre elles. Elle tombe sur ces deux mecs incroyablement bêtes, vulgaires et misogynes. Elle est vaporeuse, là sans être là, elle fait ce qu’on lui dit. On l’a tellement habituée à ce statut d’objet qu’elle ne ressent strictement rien. Mais elle a beaucoup en elle, suffisamment en tout cas pour apprendre aux deux rustres la tendresse et ça, ce n’est pas rien.


Patrick Dewaere, Stéphane dans “Préparez vos mouchoirs” (1978)

Gérard Depardieu et Patrick Dewaere dans « Préparez vos mouchoirs » (1978).

Gérard Depardieu et Patrick Dewaere dans « Préparez vos mouchoirs » (1978). Photo Étienne George/Collection Christophel

« Le pauvre mec il est mort à 35 ans. 35 ans ! Tu te rends compte de la perte… » Patrick Dewaere ne parle pas de lui-même, mais de Mozart. C’est quand même sidérant qu’il ait eu cette réplique dans un film nommé Préparez vos mouchoirs, à l’âge de 31 ans, et qu’il soit mort quatre ans plus tard… Il n’est plus ici le voyou des Valseuses, mais un prof de sport dingue de musique classique et de littérature. Un condensé, peut-être, du cinéma de Blier, où les corps et les mots ne cessent d’entrer en collision. Dewaere fera une troisième apparition chez Blier dans Beau-père, en 1981, juste avant de s’éteindre. À nous de le dire : le pauvre mec est mort à 35 ans. 35 ans ! Vous parlez d’une perte…


Gérard Depardieu, Alphonse Tram dans “Buffet froid” (1979)

Bernard Blier, Gérard Depardieu et Jean Carmet dans « Buffet Froid » (1979).

Bernard Blier, Gérard Depardieu et Jean Carmet dans « Buffet Froid » (1979). Photo Victor Rodrigue/Collection Christophel

Depardieu est sans doute le meilleur pour dire les répliques, le phrasé Blier. Par exemple : « Ça vous arrive parfois d’avoir envie de tuer quelqu’un ? […] Vous avez votre couteau dans votre poche, hop, le couteau sort de la poche, clic, la lame jaillit, clac, ça y est, le ventre est percé, un quidam qui s’écroule, personne ne s’arrête, on croirait un clochard qui roupille. » C’est la première scène de Buffet froid, le début de ce long « cauchemar » nocturne, qui finit en plein jour, et où Blier a filmé Depardieu enchaînant les scènes absurdes. Sans trop en faire : découpage très précis, plans larges et longs, l’acteur occupe si bien l’espace que ça suffit.


Michel Blanc, Antoine dans “Tenue de soirée” (1986)

Gérard Depardieu, Michel Blanc et Miou-Miou dans « Tenue de soirée » (1986).

Gérard Depardieu, Michel Blanc et Miou-Miou dans « Tenue de soirée » (1986). Cine Valse

« Moi je te trouve très belle.
– Ta gueule, tu me fais chier à tout le temps me trouver belle. »

Plus loin : « Faut que tu te tires Antoine, puisque tu sers à rien. »

Ici, Miou-Miou campe une femme moins conciliante que celle des Valseuses. Son mari, Antoine, en fait les frais. Michel Blanc n’est pas un Jean-Claude Dusse à deux doigts de conclure, il est un mari qui n’arrive pas à satisfaire son épouse et en prend plein la tronche. Mais pour elle, il est prêt à tout. À se faire insulter, à faire des cambriolages, à planter un mec, à céder aux avances d’un grand type qui sort de taule (Depardieu), à finir en travesti. L’amour selon Blier.


Anouk Grinberg, Marie dans “Mon homme” (1996)

Gérard Lanvin et Anouk Grinberg dans « Mon homme » (1996).

Gérard Lanvin et Anouk Grinberg dans « Mon homme » (1996). Films Alain Sarde

Une prostituée (qui fait ça pour le plaisir) supplie un sans-abri de lui faire l’amour et prend tellement son pied qu’elle tombe immédiatement amoureuse, sous une musique élégiaque. La scène a de quoi faire bondir. Mais comme souvent chez Blier, cette femme est victime de la lâcheté, de l’hypocrisie et de l’ingratitude des hommes. Elle n’est plus tout à fait vierge, Marie, mais elle a une quantité d’amour astronomique à donner, et elle va s’apercevoir, la pauvre, qu’il n’y a pas grand monde pour recevoir tout ça. Ici, Blier est bien plus misandre que misogyne, mais là encore, il ne condamne personne.


À voir
Sur Amazon Prime : Les Valseuses, Préparez vos mouchoirs, Calmos, Mon homme, Notre histoire, Merci la vie, Tenue de soirée, Trop belle pour toi, Hitler... connais pas, Beau-père, Un deux trois soleil.

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